EMILE DRIANT
1855 -
1916
Officier,
homme politique, écrivain combattant
Emile
Driant est né le 11 septembre 1855 à Neufchâtel
(Aisne).
Après
avoir achevé ses études au lycée de Reims,
Emile Driant entra à Saint-Cyr en 1875.
Il épousa
la fille cadette du Général Boulanger ; Auprès
duquel il rempli les fonctions d'officier d'ordonnance.
Emile
Driant fut élu en 1910 à Nancy député de la
Lorraine et se fit inscrire au groupe d'action
libérale. Il s'occupa assidûment de la défense
nationale et défendit la loi militaire de trois
ans.
Driant fut,
en novembre 1915, rapporteur du projet de loi
relatif à l'appel de la classe 1917 sous les
drapeaux. Il soutint ce projet dans les termes
suivants :
"Donnons,
au chef en qui nous avons mis notre confiance,
nos enfants de dix-neuf ans, puisqu'il nous les
demande, et à l'heure où il les demande. La
nation veut vaincre : toutes ses énergies sont
tendues vers ce but unique. Elle aura en 1916 un
matériel formidable. Ne lui refusons pas les
bras pour le mettre en oeuvre. Si vous voulez, d'ailleurs,
vous former une opinion qui ne vacille pas,
interrogez les jeunes gens de la classe 1917 eux-même
: ils vous diront qu'ils brûlent du désir de
rejoindre leurs ainés. Cette génération
magnifique et méconnue ignore la peur et ne veut
pas être défendue contre le danger. Elle nargue
superbement l'une et l'autre. Elle fera sont
sacrifice le sourire aux lèvres, comme les
"Marie-Louise" de l'autre siècle,
comme ceux de nos enfants dont les tombes
marquent la frontière de la France de 1915."

Emile
Driant avait repris du service au début des
hostilités et, lieutenant-colonel, il avait été
heureux de commander le groupe des 56ème et 59ème
bataillons de chasseurs à pied. Le premier
septembre 1914, il pénétra à la tête du 56ème
bataillon dans le village de Gercourt. Ce fait d'arme
le fit nommer officier de la légion d'honneur et
lui valut la citation suivante à l'ordre de l'armée
: " Le 1er septembre 1914, a conduit une
contre-attaque en marchant pendant plus d'une
heure sous un feu violent d'artillerie lourde. A
enlevé la position avec entrain et vigueur,
malgré le tir ininterrompu des mitrailleuses."
Les deux
bataillons de Driant, que l'affaire de Gercourt
avait éprouvés, ne prirent pas une part active
à la bataille de la Marne; ils furent chargés
de garder le secteur de Louvemont, au nord du
fort de Douaumont. Mais à la fin septembre ils
attaquèrent de nouveau, et ce fut pour reprendre
aux ennemis le bois des Caures qui, avec le bois
d'Haumont voisin, allait devenir le secteur de
tranchées des deux bataillons de Driant. Ce
secteur était relativement calme, mais le
Colonel Driant l'organisa avec le plus grand soin.
Il devinait que ce point de la ligne du front en
serait un des pluis important. Dès le 26 mai
1915, il écrivait à Mme Driant : "Il y a
sur le front bien d'autres points plus dangereux
que le notre. Mais les Allemands n'ont pas renoncés
à prendre Verdun, j'en suis absolument certain.
La lutte sera chaude; nous recevrons le premier
choc; j'ai bon espoir que mes braves chasseurs ne
les laisserons pas passer."
Le 22 août
1915, toujours inquiet, il écrivit à Paul
Deschanel, président de la Chambre des Députés
: "Je voulais écrire à M.Millerand ou au
président de la Commission de l'armée ce qui
suit. Je me permets de m'adresser à vous, parce
que je crains que ma lettre, si l'attention n'est
pas attirée sur elle, n'aille grossir le monceau
de suggestions qu'on envoie au généralissime
pour s'en débarrasser...La vague allemande va
refluer : Les russes vont être hors de cause
pour six mois. Nous pensons ici que le coup de bélier
sera donné sur la ligne Verdun-Nancy. Quel esset
moral produirait la prise de l'une de ces deux
villes ou des deux à la fois! Or, s'ils y
mettent le prix et ils ont prouvé qu'ils
savaient sacrifier 50 000 hommes pour emporter
une place; ils peuvent passer. Peut-être n'iront-ils
pas bien loin ensuite, mais ne faut-il pas tout
faire pour éviter que le trou ne se creuse?
"
Enfin, le
20 février 1916, la veille de l'attaque qu'il
avait prévue, Driant écrivait Mme Driant :
" Je ne t'écris que quelques lignes hâtives,
car je monte là-haut encourager tout mon monde,
voir les derniers préparatifs...A la grâce de
Dieu! Vois-tu je ferai de mon mieux et je me sens
très calme. J'ai toujours eu une telle chance
que j'y crois encore pour cette fois...Notre bois
aura ses premières tranchées prises dès les
premières minutes...Comme on se sent peu de
choses à ces heures là!"
Il écrivit également à un ami : "Ce soir
je passe en revue tous ceux et toutes celles à
qui je veux envoyer ma pensée avant l'assaut. Je
parle de l'assaut ennemi que nous attendons de
jour en jour et qui est certain maintenant, car
le général J...(Joffre) est venu nous l'annoncer
hier et nous dire qu'il comptait sur nous. Il
peut y compter. Et le Kronprinz qui a annoncé à
ses quatre corps d'armée la prise de Verdun
terminant la guerre, va savoir ce qu'il en coûte
pour ne pas la prendre... Certains indices ne m'avaient
pas trompés. Prévoir "la guerre de demain"
n'était pas difficile; elle devait venir. Prédire
cette ruée sur Verdun, nécéssitée par le
besoin d'avoir un succès à annoncer au
Reichstag avant le vote du nouvel emprunt, était
plus risqué. Nous allons l'avoir. Beaucoup des
chasseurs que vous avez gâtés ne seront plus là
d'ici huit ou quinze jours, et c'est ce qui m'attriste
en pensant à demain. Les avoir épargnés depuis
dix-huit mois comme j'ai la chance de le faire,
et les voir fondre dans la fournaise où ils vont
tomber!"
Les
chasseurs de Driant fondirent en effet dans la
fournaise. L'attaque massive annoncée par leur
chef eut lieu le 21 février, après une
effroyable préparation d'artillerie. Toute la
journée, les allemands donnèrent en vain l'assaut
au bois de Caures. Ils recommencèrent le
lendamain, à midi, sous un feu d'artillerie plus
violent que jamais, mais cette fois ils lancèrent
tout un corp d'armée (10 000 allemands de la 21ème
division) contre ce qu'il restait des deux
bataillons de chasseurs de Driant. Débordés des
deux côtés, les liaisons coupées avec l'arrière,
Driant pris la décision de se replier sur
Beaumont avec les chasseurs survivants. Emile
Driant fut tué au champ d'honneur, près de la
lisière du bois des Caures. Nous étions le 22 février
1916.
Des 1 300
chasseurs de Driant, seuls 400 étaient encore
vivants quand l'assaut fut donné; et 120 d'entre-eux
purent sortir du bois des Caures.
Aujourd'hui, Driant est considéré
comme le premier sauveur de Verdun.
Il est lun des 560 écrivains morts pour la France en 1914-1918 dont les noms ont été
gravés dans la pierre du Panthéon le 15 octobre
1927.
Ecrivain,
Emile Driant écrivit une trentaine de livres
sous le sous le nom de "Capitaine
Danrit".
Source
Anthologie
des écrivains morts à la guerre 1914-1918 (Tome
IV)

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