EMILE DRIANT
Ecrivain,
Emile Driant écrivit une trentaine de livres
sous le sous le nom de "Capitaine Danrit".
C'est surtout la série de romans populaires
publiée sous le titre "La guerre de demain",
qui fit sa réputation et assura son influence.
Emile
Driant a également collaboré au Journal des
Voyages, à La Libre Parole, à L'Echo
de Paris et à La Liberté du Sud-Ouest.

"L'Officier
Je vous
assure qu'il y a des moments dans la vie
militaire où l'on se redresse, en se disant :
"Je suis quelqu'un." Oui, pendant vingt
ans de notre vie, nous sommes les rouages
insignifiants d'une énorme machine : il a son
importance, le rouage; car, s'il s'arrêtait, d'autres
plus petits ne fonctionneraient plus et la marche
de l'ensemble s'en ressentirait; mais enfin il
est minuscule. Puis un jour vient où le hasard
vous donne tout à coup, à vous, officier
subalterne, hier encore noyé dans la masse, un rôle
superbe. Une armée ennemie veut passer là; si
elle passe, soldat, ton pays est menacé; c'est
à ton courage, à toi petit, à toi modeste, qu'est
dévoilu l'honneur de l'arrêter ou de mourir!...
Oui, on se redresse, et l'on est fier d'être
officier!
Et comme on fait volontiers le sacrifice de sa
vie alors! Et pourtant il a comme les autres ses
affections, l'officier. Au moment où vous le
voyez veillant la nuit, sentant dans l'ombre les
bataillons ennemis se glisser silencieusement
pour l'assaut suprême, peut-être à cette heure
une belle jeune fille, sa fiancée, pleure et
tremble pour lui.- Et lui n'aura le droit de
penser à elle qu'après la bataille. Et qui sait
si cette pensée ne sera pas la dernière, et si
la mort ne mettra pas un voile de deuil sur les
cheveux blonds de l'enfant adorée qui attend!
Vous qui jugez l'officier sur les histoires du
colonel Ramollot, sur ceux que vous voyez régulièrement
au café à l'heure de l'absinthe, sur les
exceptions qui se rencontrent dans l'armée comme
dans toutes les classes sociales, avez-vous déjà
pensé à tout ce que la vie d'un officier
vraiment digne de ce nom renferme de pauvreté,
de tristesse et de grandeur?"
"Pour
les traitres
Ah! oui, ce
sont de rudes soldats que les petits soldats de
France! Qui n'a pas vécu avec eux, ne les
connait pas; qui cherche à les détourner du
sillon héroïque et guerrier des ancêtres, est
misérable: qui voudrait leur ôter l'amour du
sol et le culte du Drapeau, est criminel; un jour
viendra où, pour punir ces misérables et ces
criminels, il n'y aura pas assez de potences sur
nos places publiques, car, pour les artisans de
cette infâme besogne, c'est au passé de la
vieille France qu'il faudra demander le châtiment
le plus infamant! A l'assassin, la guillotine; au
soldat rebelle, les douze balles du fusil de
guerre; mais au traître à la Patrie, le gibet,
le gibet qu'entourent les corbeaux et au-dessus
duquel plane la malédiction populaire!"
La guerre fatale, 1910.
Emile Driant est lun des
560 écrivains morts pour la France en 1914-1918
dont les noms ont été gravés dans la pierre du
Panthéon le 15 octobre 1927.
Source
Anthologie des écrivains morts
à la guerre 1914-1918 (Tome IV)

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